Marie-Pascale Deleume est ingénieure agronome de formation. Membre de France Nature environnement, elle représente l’association Eau et rivières de Bretagne au Conseil économique social et environnemental de Bretagne (Ceser), où elle préside la section prospective. A ce titre, elle a notamment participé aux débats préparant le rapport du Ceser sur l’alimentation en Bretagne à l’horizon 2050 ou celui sur l’usage des sols à l’horizon 2060.
Dans ce grand entretien, nous avons voulu comprendre pourquoi son association réclame un moratoire sur la méthanisation, technologie qui permet de produire du gaz à partir des sous-produits de l’agriculture (effluents d’élevage, résidus de cultures, cultures intermédiaires…).
La méthanisation agricole est souvent présentée comme une solution prometteuse pour répondre aux besoins énergétiques. Cependant, envisager qu’elle puisse fournir une quantité significative de gaz est, selon certains experts, une illusion. « Notre surface agricole française n’y suffira pas », affirme Marie-Pascale Deleume.
La concurrence entre les différents usages des terres agricoles est un enjeu majeur. « Nous aurons une compétition forte entre l’alimentation des humains, les besoins naturels et la production d’énergie », explique-t-elle. En d’autres termes, allouer des terres à la production de biomasse pour la méthanisation pourrait entraîner des tensions avec les besoins alimentaires et environnementaux.
Marie-Pascale Deleume s’intéresse à la méthanisation depuis de nombreuses années. Lors de ses études à l’école d’agronomie, elle a effectué un stage à la ferme de l’école, qui était équipée d’un méthaniseur. Elle y a constaté plusieurs problèmes récurrents, tels que des défauts de fiabilité et de stabilité des intrants. Ces difficultés techniques perdurent encore aujourd’hui, selon elle.
Outre les problèmes techniques, la méthanisation soulève des questions sociétales et écologiques. La pression exercée sur les ressources naturelles, notamment les sols et l’eau, est significative. En outre, le modèle économique sous-jacent peut entraîner une intensification agricole qui va à l’encontre des objectifs de durabilité.
🎙️ Entretien mené par Sylvain Ernault
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